Yves Philippe de Francqueville
Pirate des mots
et Philanalyste en herbe
vous propose en ligne
L'affaire du papyrus berbère
seconde partie :
Julien
Chapitre cinq :
Rebondissements…
un récit initiatique
chapitre par chapitre…
à découvrir chaque semaine
ou dans sa continuité, selon l'espace-temps !
Pirate des mots
et Philanalyste en herbe
vous propose en ligne
L'affaire du papyrus berbère
seconde partie :
Julien
Chapitre cinq :
Rebondissements…
un récit initiatique
chapitre par chapitre…
à découvrir chaque semaine
ou dans sa continuité, selon l'espace-temps !
Un récit
autour et au-delà
du Cycle de l’Austrel :
Le Cycle de Thulé
Épisode 1
L’affaire
du papyrus berbère
Les amours
d’un autre monde
première partie
© Saint-Aël 2019
Traduit de l’américain
par Olam Salomon P.
Seconde version supervisée
par Yves Philippe de FRANCQUEVILLE,
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
à Montpellier, mmxix.
Imprimé pour le plaisir,
aux dépens de l'auteur,
sans l'approbation, ni les privilèges…
de ceux qui pensent être dépositaires
de la vérité et, donc, des pouvoirs…
D’après HÉRACLITE,
En relecture libérée de toute gravité :
« La dispute est mère de toute rencontre et de toute création »
Suite et fin de la seconde partie
Chapitre cinq
Rebondissements…
00 !
Un drôle de SMS sur le téléphone de Thérèse.
Paul…
Rendez-vous ce soir…
Nous sommes jeudi.
Aurait-il déjà récupéré quelques informations, en moins de quatre jours ?
Tomas a six heures devant lui pour honorer l’entrevue, sans être suivi…
Une excellente raison de s’offrir une bonne soirée ?
Basile et Pierre-Louis sont enchantés d’être invités à un nouveau petit dîner littéraire et philosophique… pourvu que le sujet du papyrus soit abordé !
Les retrouvailles avec les deux frères, vingt minutes plus tard devant la brasserie Le Dôme, pour une balade amusante… certainement appréciée par le gendarme de faction.
Petite promenade à travers l’Écusson, à la recherche d’un bon restaurant et finalement se retrouver chez Laurette, en terrasse.
Tout est réuni pour assurer une plaisante soirée, avant d’en savoir davantage…
Bientôt minuit…
Tomas termine son cigare, avale la dernière goutte du vieil Armagnac offert par Frédéric, qui les avait accueillis en début de soirée, puis s’occupe de l’addition.
Il abandonne avec des regrets réciproques ses deux amis, maintenant prévenus d’une probable révélation imminente à propos de leur grand sujet favori !
Peut-être y aura-t-il un rappel, afin de se retrouver… et terminer ensemble la nuit, dans la confidence ?
Basile l’espère : il sera joignable à toute heure, dans son café de geek, où il se réunit régulièrement avec d’autres hardcore gamers comme lui.
La surveillance est-elle toujours de rigueur ?
Par prudence, Tomas passe par les cuisines et la cour de service, afin de s’éclipser en discrétion…
Au pas de course, il arrive à L’Analog.
La bise à Kévin ainsi qu’à sa compagne, qui lui prend la commande… petit tour aux toilettes pour le pipi de la peur… et il s’installe, mains propres et cheveux humides, en face de Paul, déjà calé dans un gros fauteuil de la salle du fond, une bière à la main.
La chemise rouge n’était pas nécessaire pour être reconnu.
Le lien familial avec Julien est flagrant, tant physiquement que dans la manière d’être à l’aise en toute circonstance.
La réponse du discret signe de tête de Tomas, par un acquiescement similaire, confirme qu’il est bien devant son robuste hôte, impressionnant, même assis.
Le dialogue est plutôt réservé, presque dans le chuchotement parfois.
L’ambiance musicale — très éclectique — couvre la discussion des tables voisines.
— Monsieur de Saint-Aël, je présume ?
Enchanté !
Paul d’Angône.
Les mains se tendent et se serrent chaleureusement.
— Bonsoir Professeur.
— Bonsoir Tomas.
— C’est une surprise et j’espère un plaisir… de vous rencontrer si vite…
Kévin arrive déjà avec une Ribouldingue — son IPA préférée — et une grande planche garnie de charcuteries, de fromages et de pain…
— Trinquons à votre fabuleux fragment… et servez-vous s’il vous plaît…
Moi, voyez, je n’hésite pas : à cette heure, j’estime que mon dîner est loin…
Très loin, même !
— Merci, je sors juste de table… avec ce que j’ai bu…
Oui, j’ose.
Dites-moi sans me faire languir…
Alors ?
Sa datation… sa texture… du vrai, oui ? Non ?
— Ah, ah !
Sérieusement ?
Vous me voyez venir à Montpellier, prendre une nuit d’hôtel… tout en ayant persuadé mon épouse et mes enfants que je participe à un séminaire, pour seulement vous annoncer que c’est du n’importe quoi ?
Bon, j’aime cette ville, soit.
Julien m’a beaucoup parlé de vous — une suite d’éloges il est vrai — mais je ne suis pas encore en vacances ou à la retraite !
Demain à quatorze heures, je serai au bureau.
Je souhaite surtout éviter un divorce coûteux !
Ah ah !
Eh bien, jeune homme !
S’il n’y avait point d’intérêt à tout cela, un SMS aurait suffi ! Finie l’aventure : basta !
— Alors…
— Alors, c’est fabuleux : ce papyrus est fort fort ancien, écriture comprise.
Accrochez-vous au fauteuil.
Les tests réalisés sont formels : il a très certainement treize mille cinq-cents ans…
— Incroyable !
Vraiment ?
Treize mille cinq-cents ans…
Réalisé donc vers la fin du Paléolithique ?
À situer un peu après l’occupation de grottes comme Lascaux ?
C’est beaucoup, beaucoup plus que je ne l’aurais cru.
Du jamais vu.
Treize mille cinq-cents ans … Non ?
Treize mille cinq-cents ans ? C’est de la folie !
Et… et la marge d’erreur ?
— Plutôt faible !
Je dirais moins d’une centaine d’années…
Pas possible alors de se disputer les dates de la création du Monde avec les religieux !
Paul et Tomas trinquent à nouveau.
Tous les deux partent dans de grands éclats de rires, qui surprennent les tables voisines.
Ils retrouvent leur calme pour la suite du dialogue.
— Vous comprenez pourquoi je viens à vous, reprend le professeur.
Cette situation est exceptionnelle.
Je ne pensais pas qu’un jour, je serais confronté à l’inconnu avec un pareil trésor…
Nous devons vraiment trouver un moyen rapide, afin de réclamer la totalité du papyrus aux autorités marocaines.
Il faut chercher à percer le mystère de l’alphabet poissons, au plus vite.
Cette écriture originale, et la qualité du papyrus, cela revisite tout ce que nous avons pu apprendre jusqu’à ce jour, sur ces périodes que beaucoup voudraient appeler la préhistoire.
La lecture de ce texte est primordiale. Nous allons mieux comprendre une partie de l’histoire de notre humanité, depuis son apparition sur cette petite planète !
Ce sera une découverte que je pense d’une importance similaire à celle de la traduction des hiéroglyphes, par Champollion.
— Peut-être… peut-être.
Avec cette date de treize mille cinq-cents ans… j’imagine davantage une provenance extra-terrestre !
Cela me semble bien plus probable.
Pour vous, il y aurait d’autres histoires, à distinguer de celles des « hommes des cavernes » qui vivaient à cette époque ?
Vous les pensez, avec leurs peaux de mammouths, côtoyer des humains ultra civilisés, possédant un savoir aussi technique ?
Je ne peux pas l’admettre !
Non…
Je sais que la mémoire des peuples est bien fragile et si souvent trahie par les autorités civiles et religieuses, mais là, c’est impossible à avaler : l’écriture sur le papyrus est réalisée en impression !
Rappelez-vous, professeur : il y a des micro pixels…
Comment penser, alors qu’à cette époque la taille de la pierre était à peine maîtrisée, que des imprimantes existaient ?
Pour moi, c’est extra-terrestre, j’en suis maintenant convaincu : des êtres venus d’ailleurs seraient passés un peu trop tôt pour nous rencontrer.
Ils ont laissé ce papyrus afin que nous puissions le découvrir, lorsque nous serions assez évolués.
Oui…
— À vous écouter, sûr de vous, jeune homme… je pense que vous me cachez quelque chose sur votre découverte…
Dites-moi vite ce que je devrais savoir !
Ah ! Nancy…
Ah ! Yidir…
La promesse dans la grotte n’est plus d’actualité…
Après Julien, c’est maintenant à Paul d’en apprendre davantage.
Il est temps de se confier.
Écoutant avec attention, le professeur comprend beaucoup mieux leurs soucis aux Maroc, les pressions qui se poursuivent encore, en France…
Posant de rares questions, il est stupéfait de découvrir la réalité des cylindres : la matière étrange et son assemblage, le mystère de l’ouverture, la lumière, les sons… cette disparition, pouvant engager tant de nouvelles hypothèses.
Les inscriptions à l’entrée, comme celles gravées dans la grotte, lui semblent également d’une importance considérable.
Paul estime que le papyrus était le trésor à trouver d’un jeu de piste extraordinaire, qui date de près de treize mille cinq-cents ans.
À cela, il nous offre surtout d’imaginer que pour arriver à sa création — et qu’il soit caché dans les montagnes du Haut Atlas — des centaines, voire des milliers d’années d’évolution et d’histoire furent nécessaires.
Oui, le possible d’une rencontre extra-terrestre est certainement envisageable.
Qu’il vienne d’un futur de la Terre, apporté par des individus de demain, en voyage et perdus dans l’espace-temps, voici treize mille cinq-cents ans ?
L’idée n’est pas à négliger, lorsque l’on étudie de plus près certaines théories d’Albert Einstein.
À lire tout ce qui fut écrit sur les variations climatiques, les impacts de météorites, les modifications de la gravité ou celles de l’axe de la Terre… avec tant de déluges subis, d’apocalypses annoncées — pour la fin des dinosaures, par exemple — pourquoi ne pas admettre la disparition d’autres mondes — même plus évolués — et ayant existé bien entendu sur notre petite planète ?
La nuit des Temps de René Barjavel nous offre une histoire qui se déroule voici neuf-cent-mille ans. Coban savait, à l’époque, réaliser des machines bien plus sophistiquées qu’une simple imprimante…
Paul jubile devant tant d’hypothèses.
Il en imagine les plus farfelues :
— Ah, ah !
Je pense à la chanson de Pierre Tisserand, reprise par Serge Reggiani : L’homme fossile !
Un homme fossile retrouvé dans la tourbe… et qui, malgré les dires des spécialistes, vivait civilisé…
On lui donne la parole, il raconte sa vie « terriblement normale » et, comme le dit le final :
« C’était avant la guerr’ avant qu’tout ait sauté
C’était voilà maint’nant bien trois millions d’années
Vous n’avez rien à craindre, y a plus de retombées ».
C’était voilà maint’nant bien trois millions d’années
Vous n’avez rien à craindre, y a plus de retombées ».
La création du papyrus ne date que de onze mille cinq-cents ans avant notre ère !
La donne est-elle différente ?
Est-ce que tout est à supposer possible ou est-ce que tout doit être supposé impossible, tant que le contraire n’a pas été prouvé ?
La non-existence d’un homme est plus délicate à justifier que son existence, que ce soit par exemple Julien Torma ou plus récemment, Jean Baptiste Botul… et tant d’autres personnages inventés pour créer le rêve ou l’imposture : une légende, un mythe, voire une religion.
Si la réalité des dieux s’affirme par une suite de miracles qui nous sont contés… personne à ce jour n’est en mesure de nous présenter pour l’un ou pour d’autres, la moindre preuve sérieuse de la paternité de leurs créations… encore moins de nous assurer l’historicité de leurs prophètes…
Roger Leloup écrivait par la bouche de Yoko Tsuno :
La donne est-elle différente ?
Est-ce que tout est à supposer possible ou est-ce que tout doit être supposé impossible, tant que le contraire n’a pas été prouvé ?
La non-existence d’un homme est plus délicate à justifier que son existence, que ce soit par exemple Julien Torma ou plus récemment, Jean Baptiste Botul… et tant d’autres personnages inventés pour créer le rêve ou l’imposture : une légende, un mythe, voire une religion.
Si la réalité des dieux s’affirme par une suite de miracles qui nous sont contés… personne à ce jour n’est en mesure de nous présenter pour l’un ou pour d’autres, la moindre preuve sérieuse de la paternité de leurs créations… encore moins de nous assurer l’historicité de leurs prophètes…
Roger Leloup écrivait par la bouche de Yoko Tsuno :
« Les humains se donnent des dieux pour se rassurer,
puis leurs inventent des légendes pour se faire peur ».
puis leurs inventent des légendes pour se faire peur ».
L’existence de ce papyrus n’est pas imaginaire.
Son texte, une fois traduit, permettra certainement de comprendre l’histoire de l’humanité, sous un autre angle de vue !
Son texte, une fois traduit, permettra certainement de comprendre l’histoire de l’humanité, sous un autre angle de vue !
Il y a peut-être des légendes porteuses de vérités oubliées ?
La discussion se poursuit jusqu’à ce que Kévin les invite à le laisser tirer le rideau sur la porte : en effet, il est déjà deux heures du matin.
* * * * *
Une nuit blanche ou presque.
Paul a rejoint sa chambre à l’hôtel Mercure, sur le coup de quatre heures : son train est à onze heures. Il récupérera le temps du voyage !
Basile est passé ensuite…
Tomas n’a pas résisté à lui confier les résultats des tests réalisés au CNRS de Lyon et à lui raconter ce qu’ils ont vécu dans la grotte ; surtout ce qu’il a osé faire, à l’insu de ses amis.
Même s’il manque encore quelques détails et pas des moindres (l’existence du second papyrus, le mystère autour des cylindres), c’est difficile de s’endormir alors.
Depuis la venue de Julien, tout évolue si plaisamment que sa solitude étrangère semble bien lointaine. Les rencontres sont plus simples, plus belles, plus sincères.
Il est vrai que ses amis proches commencent à lire ses essais sur l’amour humain. Le fait qu’il écrive était connu, pourtant si peu se donnaient le temps de découvrir les fruits de ses recherches.
Basile a su apprécier le fait d’apprendre et ose maintenant se construire dans le plaisir, sans frustration, ni tabou, tout en étant en quête d’une liberté forte en ondes de charme.
Ils dorment depuis peu lorsque l’alarme du téléphone de Tomas le pousse hors du lit.
Veillant à ne pas réveiller son ami, il s’affaire sans trop de bruit afin de préparer sa montée sur Paris, dès samedi matin : demain !
Il voudrait informer au plus vite Nancy et Yidir de la nouvelle !
Par téléphone… c’est impossible : trop dangereux.
Pour fixer un rendez-vous, à la rigueur.
Un nouveau portable sera nécessaire, car celui de Thérèse n’est certainement plus fiable.
À Paris, il lui faudra trouver le temps et la discrétion pour leur présenter Julien ; et enfin, commencer les démarches diplomatiques.
La Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz est de rigueur, afin de réfléchir en musique.
Il prépare les copies scannées de l’intégralité du fragment pour les envoyer sur une de ses boîtes mail… pense à sortir la valise, quelques vêtements, les chargeurs, la sacoche pour l’ordinateur…
Surtout, prendre du temps encore et encore, à regarder sans se lasser, le troisième fragment : treize mille cinq-cents ans… et dans un parfait état de conservation…
Il est comme neuf, l’impression parfaite…
Basile, qui sort de la chambre pour aller uriner, surprend Tomas rêveur, le papyrus entre les mains.
— Ah, c’est incroyable !
Non !
Tu en possèdes encore un bout ?
Encore une cachotterie !
Décidément, tu es redoutable avec tous ces secrets si bien gardés !
Qu’est-ce que je ne sais pas encore, hein ?
Montre-moi ça !
Donne-le-moi…
Je veux le toucher, je veux pouvoir le dire, l’écrire et que mes nombreux descendants le sachent : moi, Basile du Rist, j’ai eu ce jour, entre les mains, un authentique morceau du très mystérieux papyrus berbère !
— Oh, mon grand… si tu veux toucher, va d’abord te laver et surtout t’habiller !
Un peu de dignité face à l’objet du délit : avec ça, nous pouvons tous aller en taule.
Et vu mon implication majeure, je suis bon pour perpette !
Le rire des amis emplit l’appartement.
Tomas continue à se préparer, vite rejoint par Basile, prolixe en questions et en propositions pertinentes.
Il apprécie la confiance accordée : s’intéressant au fait que la partie découpée soit la dernière colonne, complète, du papyrus ; il s’envoie par mail l’intégralité des pages scannées, afin de poursuivre chez lui ses recherches.
Elles sont pour le moment demeurées vaines, sur l’alphabet poissons.
Jusqu’à présent ses documents d’études étaient réalisés à partir des photos trouvées sur l’internet, de qualité moindre, n’offrant que des parties du texte.
Avoir la dernière « page » dans sa totalité, en qualité de reproduction maximale, c’est un atout non négligeable, car il pourrait y avoir une signature, des mots habituels de conclusion…
Bref, de quoi espérer trouver plus rapidement le sens de l’alphabet poissons.
L’après-midi se termine avec quelques temps de sieste, le passage au Tabac pour deux cartes sim prépayées, choisir quelques bons cigares, sans oublier un saut en fin de journée à l’Apple Store, afin d’acquérir le nouveau téléphone.
Lorsque Tomas rentre, il regarde par reflexe le portable de Thérèse et, surprise, le chiffre « 18 » s’affiche, avec ajouté : « prendre tout, de suite ».
Il est déjà dix-huit heures vingt, passées…
Que veut Paul ?
Il y a un problème, c’est certain.
Basile allait rejoindre le petit appartement d’étudiant qu’il occupe en colocation…
Il accueille bien entendu la demande à rester sur place, comme d’habitude, pour garder les lieux, prendre soin des fleurs, de Sumo et profiter de l’espace.
Sans attendre davantage, sans donner d’autre explication que de dire qu’il est à Toulouse, si quelqu’un demande à le contacter, Tomas ferme sa valise, après y avoir ajouté ses derniers achats.
Il attrape la sacoche de l’ordinateur portable, câline le menton de Sumo qui déteste le voir partir, et remerciant d’une bise sonore Basile, quelque peu inquiet, il se dirige à pied vers la gare Saint-Roch.
Comme depuis son retour en France, il est suivi de pas trop près par un nouveau gendarme en mission de surveillance rapprochée.
Il passe par en bas, stoppe devant le panneau des départs, prend les escalators, et ressort devant le grand hall, vers le Pont de Sète, en ayant semé son gardien, pour monter dans un petit taxi électrique, en usage dans le centre-ville.
Lorsqu’il pose sa valise dans le coffre, il se remémore la phrase du SMS : « prendre tout, de suite ».
S’asseyant, il demande à être déposé chez lui…
Devant l’appartement, le chauffeur en attente.
Oubliant l’ascenseur trop lent, Tomas grimpe à grandes enjambées les quatre étages et entre sous le regard médusé de Basile.
Il fonce vers la chambre et en ressort aussitôt, un vieux livre à la main — le Jules Verne qui était posé sur sa table de chevet — pour repartir, toujours en courant… lâchant un innocent : j’avais oublié quelque chose ! et son rituel : n’oublie surtout pas d’arroser les fleurs ! Merci, Merci…
De retour dans le taxi, c’est à L’Analog, maintenant, qu’il souhaite se rendre.
Quelques minutes encore, pour un trajet généralement plus rapide à pied… s’il n’y avait les bagages. La discrétion est davantage assurée.
Devant le bar, un billet de cinquante euros donné au chauffeur : le coût de sa patience à l’attendre sur la place Saint-Roch.
Tomas entre avec la sacoche et son livre.
Paul a rejoint sa chambre à l’hôtel Mercure, sur le coup de quatre heures : son train est à onze heures. Il récupérera le temps du voyage !
Basile est passé ensuite…
Tomas n’a pas résisté à lui confier les résultats des tests réalisés au CNRS de Lyon et à lui raconter ce qu’ils ont vécu dans la grotte ; surtout ce qu’il a osé faire, à l’insu de ses amis.
Même s’il manque encore quelques détails et pas des moindres (l’existence du second papyrus, le mystère autour des cylindres), c’est difficile de s’endormir alors.
Depuis la venue de Julien, tout évolue si plaisamment que sa solitude étrangère semble bien lointaine. Les rencontres sont plus simples, plus belles, plus sincères.
Il est vrai que ses amis proches commencent à lire ses essais sur l’amour humain. Le fait qu’il écrive était connu, pourtant si peu se donnaient le temps de découvrir les fruits de ses recherches.
Basile a su apprécier le fait d’apprendre et ose maintenant se construire dans le plaisir, sans frustration, ni tabou, tout en étant en quête d’une liberté forte en ondes de charme.
Ils dorment depuis peu lorsque l’alarme du téléphone de Tomas le pousse hors du lit.
Veillant à ne pas réveiller son ami, il s’affaire sans trop de bruit afin de préparer sa montée sur Paris, dès samedi matin : demain !
Il voudrait informer au plus vite Nancy et Yidir de la nouvelle !
Par téléphone… c’est impossible : trop dangereux.
Pour fixer un rendez-vous, à la rigueur.
Un nouveau portable sera nécessaire, car celui de Thérèse n’est certainement plus fiable.
À Paris, il lui faudra trouver le temps et la discrétion pour leur présenter Julien ; et enfin, commencer les démarches diplomatiques.
La Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz est de rigueur, afin de réfléchir en musique.
Il prépare les copies scannées de l’intégralité du fragment pour les envoyer sur une de ses boîtes mail… pense à sortir la valise, quelques vêtements, les chargeurs, la sacoche pour l’ordinateur…
Surtout, prendre du temps encore et encore, à regarder sans se lasser, le troisième fragment : treize mille cinq-cents ans… et dans un parfait état de conservation…
Il est comme neuf, l’impression parfaite…
Basile, qui sort de la chambre pour aller uriner, surprend Tomas rêveur, le papyrus entre les mains.
— Ah, c’est incroyable !
Non !
Tu en possèdes encore un bout ?
Encore une cachotterie !
Décidément, tu es redoutable avec tous ces secrets si bien gardés !
Qu’est-ce que je ne sais pas encore, hein ?
Montre-moi ça !
Donne-le-moi…
Je veux le toucher, je veux pouvoir le dire, l’écrire et que mes nombreux descendants le sachent : moi, Basile du Rist, j’ai eu ce jour, entre les mains, un authentique morceau du très mystérieux papyrus berbère !
— Oh, mon grand… si tu veux toucher, va d’abord te laver et surtout t’habiller !
Un peu de dignité face à l’objet du délit : avec ça, nous pouvons tous aller en taule.
Et vu mon implication majeure, je suis bon pour perpette !
Le rire des amis emplit l’appartement.
Tomas continue à se préparer, vite rejoint par Basile, prolixe en questions et en propositions pertinentes.
Il apprécie la confiance accordée : s’intéressant au fait que la partie découpée soit la dernière colonne, complète, du papyrus ; il s’envoie par mail l’intégralité des pages scannées, afin de poursuivre chez lui ses recherches.
Elles sont pour le moment demeurées vaines, sur l’alphabet poissons.
Jusqu’à présent ses documents d’études étaient réalisés à partir des photos trouvées sur l’internet, de qualité moindre, n’offrant que des parties du texte.
Avoir la dernière « page » dans sa totalité, en qualité de reproduction maximale, c’est un atout non négligeable, car il pourrait y avoir une signature, des mots habituels de conclusion…
Bref, de quoi espérer trouver plus rapidement le sens de l’alphabet poissons.
L’après-midi se termine avec quelques temps de sieste, le passage au Tabac pour deux cartes sim prépayées, choisir quelques bons cigares, sans oublier un saut en fin de journée à l’Apple Store, afin d’acquérir le nouveau téléphone.
Lorsque Tomas rentre, il regarde par reflexe le portable de Thérèse et, surprise, le chiffre « 18 » s’affiche, avec ajouté : « prendre tout, de suite ».
Il est déjà dix-huit heures vingt, passées…
Que veut Paul ?
Il y a un problème, c’est certain.
Basile allait rejoindre le petit appartement d’étudiant qu’il occupe en colocation…
Il accueille bien entendu la demande à rester sur place, comme d’habitude, pour garder les lieux, prendre soin des fleurs, de Sumo et profiter de l’espace.
Sans attendre davantage, sans donner d’autre explication que de dire qu’il est à Toulouse, si quelqu’un demande à le contacter, Tomas ferme sa valise, après y avoir ajouté ses derniers achats.
Il attrape la sacoche de l’ordinateur portable, câline le menton de Sumo qui déteste le voir partir, et remerciant d’une bise sonore Basile, quelque peu inquiet, il se dirige à pied vers la gare Saint-Roch.
Comme depuis son retour en France, il est suivi de pas trop près par un nouveau gendarme en mission de surveillance rapprochée.
Il passe par en bas, stoppe devant le panneau des départs, prend les escalators, et ressort devant le grand hall, vers le Pont de Sète, en ayant semé son gardien, pour monter dans un petit taxi électrique, en usage dans le centre-ville.
Lorsqu’il pose sa valise dans le coffre, il se remémore la phrase du SMS : « prendre tout, de suite ».
S’asseyant, il demande à être déposé chez lui…
Devant l’appartement, le chauffeur en attente.
Oubliant l’ascenseur trop lent, Tomas grimpe à grandes enjambées les quatre étages et entre sous le regard médusé de Basile.
Il fonce vers la chambre et en ressort aussitôt, un vieux livre à la main — le Jules Verne qui était posé sur sa table de chevet — pour repartir, toujours en courant… lâchant un innocent : j’avais oublié quelque chose ! et son rituel : n’oublie surtout pas d’arroser les fleurs ! Merci, Merci…
De retour dans le taxi, c’est à L’Analog, maintenant, qu’il souhaite se rendre.
Quelques minutes encore, pour un trajet généralement plus rapide à pied… s’il n’y avait les bagages. La discrétion est davantage assurée.
Devant le bar, un billet de cinquante euros donné au chauffeur : le coût de sa patience à l’attendre sur la place Saint-Roch.
Tomas entre avec la sacoche et son livre.
* * * * *
Paul est bien là, visage fatigué, avec toujours une épaisse chemise rouge, et un sourire au coin des lèvres.
— Bravo jeune homme !
À peine une petite heure de retard… j’ai déjà trois bières d’avance sur vous.
Tomas ne cherche pas à se justifier.
Il a fait de son mieux.
Paul semble plutôt dans l’humour que dans la critique.
Kévin prend la commande… alors que Paul chuchote à l’oreille de Tomas :
— Mon ami… c’est de la folie !
Je ne m’étais pas amusé autant depuis mes derniers camps scouts… et cela date d’au moins quarante ans…
Je commence par quoi ?
La catastrophique nouvelle ou l’impossible nouvelle ?
— Vous m’inquiétez !
Pourquoi donc êtes-vous de retour aussi vite ?
Où est le problème ?
Ils se sont trompés finalement…
La marge d’erreur ?
Dites-moi ce qu’il y a de catastrophique…
C’est un faux ?
— Ah ah… pas de marge d’erreur !
Non !
Par contre, c’est difficile de faire plus faux…
— Comment ?
— Bon, ne paniquez pas !
Il faut que vous sachiez déjà qu’un des chercheurs impliqués dans notre aventure est actuellement en garde-à-vue…
Et que son fragment doit probablement être en possession de la police !
— Merdum…
Ce n’est pas drôle pour lui.
— Vous parlez du fragment ?
Ah, ah !
Ce n’est pas faux non plus !
Pour Andrée, oh, c’est de sa faute : elle savait les risques encourus si elle parlait.
Et elle a parlé… à son mari, qui n’a pas su tenir sa langue !
Et ça m’amuse !
Oui, en fait, elle n’a pas grand-chose à craindre. Elle ne le regrettera pas.
Comme elle est le déclencheur que j’attendais, je saurai la remercier.
C’est la plus sympathique de mes collègues, la plus efficace certainement.
Il fallait que le résultat de nos recherches se sache au plus vite : je préfère que ce soit par elle, car son intégrité est connue.
Je l’ai surnommée l’Incorruptible.
Nous pouvons maintenant agir.
Pour le moment, c’est la vitesse de répercussion sur nous tous qu’il faut gérer, afin d’en profiter.
Même si Andrée ne vous connaît pas, le lien entre elle et moi arrivera tôt ou tard, puis sur Julien… donc, de toutes les façons, les policiers, qui sont par natur' si ballots… dirait Brassens, débarqueront incessamment sous peu. C’est une affaire qui nous dépasse tous !
Les enfants sont prévenus…
J’ai envoyé mon épouse à la campagne et je suis arrivé en voiture, cette fois.
— Je suis sincèrement désolé…
— Non, pas de souci !
Je m’amuse comme lorsque j’étais adolescent, passionné, dans une aventure de Maurice Leblanc…
Écoutez la suite : c’est formidable !
Paul se rapproche de Tomas et lui murmure dans l’oreille :
— Je ne sais pas quelle hypothèse est la bonne, entre futur, passé… ou extra-terrestres ; ce qui est certain, c’est que votre espèce de papyrus n’en est pas vraiment un…
C’est incompréhensible pour la science !
C’est merveilleux pour le scientifique que je suis.
— Je ne comprends pas…
— Moi non plus…
Attendez, ce n’est pas fini : cet objet d’une matière inconnue a été créé dans la masse ; comme réalisé — vous allez rire — par une sorte d’imprimante 3D…
Vous aviez donc raison.
La particularité la plus invraisemblable, c’est que l’écriture forme un tout avec le papyrus…
Cela s’est fabriqué en même temps, sans différencier la structure moléculaire…
— Je comprends encore moins…
— Alors, alors… pour faire simple, vous vous souvenez des Tintin ?
— Cette littérature pour enfants sages, de bonne famille ?
Elle a éduqué ma jeunesse…
J’en ai encore de très bons restes !
— Eh bien…
Mieux vaudrait être sourd que d’entendre ça !
Bon… écoutez…
Votre papyrus a été presque créé avec par une des machines du professeur Tournesol…
— Une machine du prof… ah, ah…
Je me souviens : Tintin et le lac aux requins…
Le dessin animé d’Hergé… des années soixante-dix je pense…
Je n’étais même pas né, mais j’ai lu la version bédé !
Oui… les chapeaux des Dupondt qui gonflent… et tout explose ?
— Presque…
Plutôt bonne, la mémoire… mais c’était une boîte de cigarillos du méchant Rastapopoulos !
Donc voilà, par un processus certainement similaire, le papyrus est une copie…
— C’est une blague ?
— J’aimerais bien…
Quoi que… non !
À ce jour, personne n’arriverait à créer un livre et son impression en simultanée…
Pour le papyrus, c’est ce qui fut fait, à partir d’un original !
Nous avons un mystère de plus.
C’est énorme !
— Wahoo…
Géant !
— Et la matière, Tomas… la matière !
Je ne saurais vous expliquer : c’est un composite qui imite la texture du papyrus, associant toutes ses propriétés, de même pour celles de l’encre, mais sans en être !
Ce n’est donc pas un papyrus imprimé à l’encre, mais un faux conforme à la réalité.
En apparence, c’est une parfaite copie.
Nous sommes face à l’inconnu.
— C’est étrange !
Vraiment… je pense avoir déjà ressenti cette sensation !
Oui, dans la grotte : toutes les pierres qui cachaient les cylindres étaient similaires, comme des copies parfaites.
C’était des pierres, elles avaient la texture de la pierre, le poids pareillement… mais comme sorties toutes d’un même moule sans être moulées…
— Tout est donc lié !
Eh bien… encore une cachotterie au vieil oncle Paul !
Tu avais omis de me parler des pierres…
Paul se surprend à tutoyer Tomas, qui apprécie d’un sourire.
— Bon, oui mon grand, tu pourrais être mon fils. Et je suis sûr que nos familles cousinent !
Alors, alors… petit cousin, revenons à nos moutons : le mystère s’épaissit.
Ah ah !
Ce papyrus, c’est comme le corps du Christ lors de la consubstantiation : on dirait du pain, mais ce n’est pas du pain, tout en ayant les propriétés du pain, sans en avoir l’essence… alors que oui… un jour, je te l’avoue, j’ai vérifié avec mes machines : c’est bien du pain.
Et voilà que je blasphème encore !
Ah ah !
C’est mon Irlandaise de femme qui va être contente : un sacrilège de plus à mon actif !
Plus sérieusement, je t’assure, cela semble être un papyrus, mais ce n’est pas un papyrus : il est réalisé avec une matière inconnue.
Oui, inconnue ! Un mystère de plus.
— Cela me fait rêver !
— Oui, mon cher Tomas, c’est de la folie… il est temps d’agir avec subtilité.
— Que proposez-vous ?
— Le système ne va pas apprécier, car je pense qu’un passage en force sera nécessaire.
Je ne n’adhère pas vraiment aux théories du complot, même si, de par mon expérience de scientifique au service de l’État, je sais qu’il nous est tenu — celles et ceux qui œuvrons au CNRS — de respecter un protocole qui parfois s’apparente au mensonge…
C’est bien entendu pour le salut de tous et chacun, voire pour la sécurité nationale… que nous devons cacher au peuple certaines découvertes !
Tout simplement, naturellement aux yeux de tout pouvoir, mentir au peuple est un devoir, expliquait Machiavel dans « Le Prince ».
Maintenant, grâce à toi, je passe à autre chose.
Je suis ravi de te dire que dès ce soir ou d’ici quelques jours, il y a de fortes chances que mon poste soit vacant…
— Je m’en doute !
Si cela vous plaît… moi cela m’enchante !
Je suis un pirate.
Je ne me sens pas en accord avec les diktats d’un pouvoir politique, quel qu’il soit. D’une religion encore moins.
Que devons-nous oser ?
Je suis à votre disposition.
— Bien : les présentations sont faites.
J’ai contacté Julien, pendant le trajet. Il t’attend dès que possible.
Je n’ai pas pris connaissance de ce qu’il fomente, mais j’ai confiance en mon neveu…
Je sais que tu comptes désormais pour lui plus que personne encore à ce jour.
Je veille sur lui depuis la mort de son père, l’année de ses onze ans. Philippe était mon grand frère préféré.
Depuis, l’enfant est devenu un homme.
J’apprécie son parcours plutôt brillant, sauf pour sa vie affective… mais, bon, le milieu dans lequel il vit n’est pas simple pour aimer et être aimé.
Jusqu’à votre rencontre ?
— Vous êtes son oncle paternel ?
J’avais remarqué sur sa chevalière les mêmes armes que les vôtres… je pense : « de gueules à trois épées d’argent posées deux en sautoir et la troisième sur le tout en pal, les pointes vers le chef, surmontées d’une étoile d’or, les gardes du dernier métal ».
Pourtant, il ne porte pas le même nom que vous ?
Je n’ai pas encore osé lui en parler…
— Ah ! Tout à fait !
Tu as l’œil !
Tu es connaisseur et plutôt doué pour l’avoir remarqué avec finesse… car il ne se laisse généralement pas faire.
Sa chevalière (celle de son père), il la porte très rarement. C’est certainement pour toi qu’il a voulu la remettre. Il t’expliquera, j’en suis sûr : des querelles de famille depuis les partages…
Pas simple l’héritage à gérer pour un enfant mineur, notamment avec mon autre frère Alexis, l’aîné — son parrain — qui ne supporte pas de le voir vivre sa vie libérée de toute morale religieuse… et son plaisir à être toujours au-devant de la scène.
Il a cependant des valeurs, ce petit.
« Papire » c’est son troisième prénom, relevé afin de prendre une certaine indépendance avec le système. Au regard de l’État Civil, mon cher neveu s’appelle Jean Julien Papire d’Angône…
Son père était poète et érudit.
Comme Julien, je ne me suis jamais vraiment consolé de son départ et, depuis que sa mère s’est remariée avec un juif orthodoxe, les contacts avec elle sont quasi inexistants pour nous tous.
— Oh, oui, je comprends mieux.
On ne se console pas toujours, malgré les dires d’Antoine de Saint-Exupéry, dans Le petit prince.
Je savais que Papire était le prénom d’un philosophe du seizième siècle !
Merci Paul… voici de plaisantes explications qui me donnent à aimer Julien davantage… et à désirer le découvrir plus encore !
— J’en suis convaincu et cela me fait très plaisir…
Ta folie de pirate me plaît bien : j’ai commencé à lire quelques-uns de tes écrits !
Vous êtes fort proches tous les deux.
Je compte beaucoup sur votre rencontre, pour lui redonner le sourire, et lui permettre de révéler enfin le sens de sa vie !
Allez, Tomas, il est temps d’agir.
Sans rentrer chez toi, prends le premier train pour Paris.
Voilà un autre téléphone avec lequel tu peux nous contacter, Julien et moi, uniquement.
J’ai mémorisé deux nouveaux numéros.
Je vous rejoindrai bientôt, car je souhaite tout d’abord m’occuper moi-même du fragment resté au CNRS.
Je vais tenter cette nuit quelques autres expériences, notamment avec le spectromètre de masse, avant de n’avoir plus l’accès au laboratoire.
J’espère que tu as pris le dernier ?
— Oui Paul… bien entendu.
Je l’ai sur moi.
— Alors go on !
Fonce bel enfant ! Ne te retourne pas…
L’aventure ne fait que commencer !
— Bravo jeune homme !
À peine une petite heure de retard… j’ai déjà trois bières d’avance sur vous.
Tomas ne cherche pas à se justifier.
Il a fait de son mieux.
Paul semble plutôt dans l’humour que dans la critique.
Kévin prend la commande… alors que Paul chuchote à l’oreille de Tomas :
— Mon ami… c’est de la folie !
Je ne m’étais pas amusé autant depuis mes derniers camps scouts… et cela date d’au moins quarante ans…
Je commence par quoi ?
La catastrophique nouvelle ou l’impossible nouvelle ?
— Vous m’inquiétez !
Pourquoi donc êtes-vous de retour aussi vite ?
Où est le problème ?
Ils se sont trompés finalement…
La marge d’erreur ?
Dites-moi ce qu’il y a de catastrophique…
C’est un faux ?
— Ah ah… pas de marge d’erreur !
Non !
Par contre, c’est difficile de faire plus faux…
— Comment ?
— Bon, ne paniquez pas !
Il faut que vous sachiez déjà qu’un des chercheurs impliqués dans notre aventure est actuellement en garde-à-vue…
Et que son fragment doit probablement être en possession de la police !
— Merdum…
Ce n’est pas drôle pour lui.
— Vous parlez du fragment ?
Ah, ah !
Ce n’est pas faux non plus !
Pour Andrée, oh, c’est de sa faute : elle savait les risques encourus si elle parlait.
Et elle a parlé… à son mari, qui n’a pas su tenir sa langue !
Et ça m’amuse !
Oui, en fait, elle n’a pas grand-chose à craindre. Elle ne le regrettera pas.
Comme elle est le déclencheur que j’attendais, je saurai la remercier.
C’est la plus sympathique de mes collègues, la plus efficace certainement.
Il fallait que le résultat de nos recherches se sache au plus vite : je préfère que ce soit par elle, car son intégrité est connue.
Je l’ai surnommée l’Incorruptible.
Nous pouvons maintenant agir.
Pour le moment, c’est la vitesse de répercussion sur nous tous qu’il faut gérer, afin d’en profiter.
Même si Andrée ne vous connaît pas, le lien entre elle et moi arrivera tôt ou tard, puis sur Julien… donc, de toutes les façons, les policiers, qui sont par natur' si ballots… dirait Brassens, débarqueront incessamment sous peu. C’est une affaire qui nous dépasse tous !
Les enfants sont prévenus…
J’ai envoyé mon épouse à la campagne et je suis arrivé en voiture, cette fois.
— Je suis sincèrement désolé…
— Non, pas de souci !
Je m’amuse comme lorsque j’étais adolescent, passionné, dans une aventure de Maurice Leblanc…
Écoutez la suite : c’est formidable !
Paul se rapproche de Tomas et lui murmure dans l’oreille :
— Je ne sais pas quelle hypothèse est la bonne, entre futur, passé… ou extra-terrestres ; ce qui est certain, c’est que votre espèce de papyrus n’en est pas vraiment un…
C’est incompréhensible pour la science !
C’est merveilleux pour le scientifique que je suis.
— Je ne comprends pas…
— Moi non plus…
Attendez, ce n’est pas fini : cet objet d’une matière inconnue a été créé dans la masse ; comme réalisé — vous allez rire — par une sorte d’imprimante 3D…
Vous aviez donc raison.
La particularité la plus invraisemblable, c’est que l’écriture forme un tout avec le papyrus…
Cela s’est fabriqué en même temps, sans différencier la structure moléculaire…
— Je comprends encore moins…
— Alors, alors… pour faire simple, vous vous souvenez des Tintin ?
— Cette littérature pour enfants sages, de bonne famille ?
Elle a éduqué ma jeunesse…
J’en ai encore de très bons restes !
— Eh bien…
Mieux vaudrait être sourd que d’entendre ça !
Bon… écoutez…
Votre papyrus a été presque créé avec par une des machines du professeur Tournesol…
— Une machine du prof… ah, ah…
Je me souviens : Tintin et le lac aux requins…
Le dessin animé d’Hergé… des années soixante-dix je pense…
Je n’étais même pas né, mais j’ai lu la version bédé !
Oui… les chapeaux des Dupondt qui gonflent… et tout explose ?
— Presque…
Plutôt bonne, la mémoire… mais c’était une boîte de cigarillos du méchant Rastapopoulos !
Donc voilà, par un processus certainement similaire, le papyrus est une copie…
— C’est une blague ?
— J’aimerais bien…
Quoi que… non !
À ce jour, personne n’arriverait à créer un livre et son impression en simultanée…
Pour le papyrus, c’est ce qui fut fait, à partir d’un original !
Nous avons un mystère de plus.
C’est énorme !
— Wahoo…
Géant !
— Et la matière, Tomas… la matière !
Je ne saurais vous expliquer : c’est un composite qui imite la texture du papyrus, associant toutes ses propriétés, de même pour celles de l’encre, mais sans en être !
Ce n’est donc pas un papyrus imprimé à l’encre, mais un faux conforme à la réalité.
En apparence, c’est une parfaite copie.
Nous sommes face à l’inconnu.
— C’est étrange !
Vraiment… je pense avoir déjà ressenti cette sensation !
Oui, dans la grotte : toutes les pierres qui cachaient les cylindres étaient similaires, comme des copies parfaites.
C’était des pierres, elles avaient la texture de la pierre, le poids pareillement… mais comme sorties toutes d’un même moule sans être moulées…
— Tout est donc lié !
Eh bien… encore une cachotterie au vieil oncle Paul !
Tu avais omis de me parler des pierres…
Paul se surprend à tutoyer Tomas, qui apprécie d’un sourire.
— Bon, oui mon grand, tu pourrais être mon fils. Et je suis sûr que nos familles cousinent !
Alors, alors… petit cousin, revenons à nos moutons : le mystère s’épaissit.
Ah ah !
Ce papyrus, c’est comme le corps du Christ lors de la consubstantiation : on dirait du pain, mais ce n’est pas du pain, tout en ayant les propriétés du pain, sans en avoir l’essence… alors que oui… un jour, je te l’avoue, j’ai vérifié avec mes machines : c’est bien du pain.
Et voilà que je blasphème encore !
Ah ah !
C’est mon Irlandaise de femme qui va être contente : un sacrilège de plus à mon actif !
Plus sérieusement, je t’assure, cela semble être un papyrus, mais ce n’est pas un papyrus : il est réalisé avec une matière inconnue.
Oui, inconnue ! Un mystère de plus.
— Cela me fait rêver !
— Oui, mon cher Tomas, c’est de la folie… il est temps d’agir avec subtilité.
— Que proposez-vous ?
— Le système ne va pas apprécier, car je pense qu’un passage en force sera nécessaire.
Je ne n’adhère pas vraiment aux théories du complot, même si, de par mon expérience de scientifique au service de l’État, je sais qu’il nous est tenu — celles et ceux qui œuvrons au CNRS — de respecter un protocole qui parfois s’apparente au mensonge…
C’est bien entendu pour le salut de tous et chacun, voire pour la sécurité nationale… que nous devons cacher au peuple certaines découvertes !
Tout simplement, naturellement aux yeux de tout pouvoir, mentir au peuple est un devoir, expliquait Machiavel dans « Le Prince ».
Maintenant, grâce à toi, je passe à autre chose.
Je suis ravi de te dire que dès ce soir ou d’ici quelques jours, il y a de fortes chances que mon poste soit vacant…
— Je m’en doute !
Si cela vous plaît… moi cela m’enchante !
Je suis un pirate.
Je ne me sens pas en accord avec les diktats d’un pouvoir politique, quel qu’il soit. D’une religion encore moins.
Que devons-nous oser ?
Je suis à votre disposition.
— Bien : les présentations sont faites.
J’ai contacté Julien, pendant le trajet. Il t’attend dès que possible.
Je n’ai pas pris connaissance de ce qu’il fomente, mais j’ai confiance en mon neveu…
Je sais que tu comptes désormais pour lui plus que personne encore à ce jour.
Je veille sur lui depuis la mort de son père, l’année de ses onze ans. Philippe était mon grand frère préféré.
Depuis, l’enfant est devenu un homme.
J’apprécie son parcours plutôt brillant, sauf pour sa vie affective… mais, bon, le milieu dans lequel il vit n’est pas simple pour aimer et être aimé.
Jusqu’à votre rencontre ?
— Vous êtes son oncle paternel ?
J’avais remarqué sur sa chevalière les mêmes armes que les vôtres… je pense : « de gueules à trois épées d’argent posées deux en sautoir et la troisième sur le tout en pal, les pointes vers le chef, surmontées d’une étoile d’or, les gardes du dernier métal ».
Pourtant, il ne porte pas le même nom que vous ?
Je n’ai pas encore osé lui en parler…
— Ah ! Tout à fait !
Tu as l’œil !
Tu es connaisseur et plutôt doué pour l’avoir remarqué avec finesse… car il ne se laisse généralement pas faire.
Sa chevalière (celle de son père), il la porte très rarement. C’est certainement pour toi qu’il a voulu la remettre. Il t’expliquera, j’en suis sûr : des querelles de famille depuis les partages…
Pas simple l’héritage à gérer pour un enfant mineur, notamment avec mon autre frère Alexis, l’aîné — son parrain — qui ne supporte pas de le voir vivre sa vie libérée de toute morale religieuse… et son plaisir à être toujours au-devant de la scène.
Il a cependant des valeurs, ce petit.
« Papire » c’est son troisième prénom, relevé afin de prendre une certaine indépendance avec le système. Au regard de l’État Civil, mon cher neveu s’appelle Jean Julien Papire d’Angône…
Son père était poète et érudit.
Comme Julien, je ne me suis jamais vraiment consolé de son départ et, depuis que sa mère s’est remariée avec un juif orthodoxe, les contacts avec elle sont quasi inexistants pour nous tous.
— Oh, oui, je comprends mieux.
On ne se console pas toujours, malgré les dires d’Antoine de Saint-Exupéry, dans Le petit prince.
Je savais que Papire était le prénom d’un philosophe du seizième siècle !
Merci Paul… voici de plaisantes explications qui me donnent à aimer Julien davantage… et à désirer le découvrir plus encore !
— J’en suis convaincu et cela me fait très plaisir…
Ta folie de pirate me plaît bien : j’ai commencé à lire quelques-uns de tes écrits !
Vous êtes fort proches tous les deux.
Je compte beaucoup sur votre rencontre, pour lui redonner le sourire, et lui permettre de révéler enfin le sens de sa vie !
Allez, Tomas, il est temps d’agir.
Sans rentrer chez toi, prends le premier train pour Paris.
Voilà un autre téléphone avec lequel tu peux nous contacter, Julien et moi, uniquement.
J’ai mémorisé deux nouveaux numéros.
Je vous rejoindrai bientôt, car je souhaite tout d’abord m’occuper moi-même du fragment resté au CNRS.
Je vais tenter cette nuit quelques autres expériences, notamment avec le spectromètre de masse, avant de n’avoir plus l’accès au laboratoire.
J’espère que tu as pris le dernier ?
— Oui Paul… bien entendu.
Je l’ai sur moi.
— Alors go on !
Fonce bel enfant ! Ne te retourne pas…
L’aventure ne fait que commencer !
C'est la fin de la seconde partie
Julien
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Basile
et son premier chapitre
Jules Verne
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Être lu sense la vie de l'écrivain.
Merci.
pour me contacter : yvesdefrancqueville@yahoo.fr
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L'affaire du papyrus berbère est un récit initiatique, première partie des Amours d'un autre monde, épisode 1 du Cycle de Thulé des écrits de Yves Philippe de Francqueville, pirate des mots et philanalyste en herbe.
tous droits réservés ©.
Toute phrase sortie de son contexte pour un usage fallacieux sera considérée comme acte détestable de manipulation et sera rejetée par l'auteur qui accueille la légitimité de cet écrit uniquement reçu dans son intégralité.
Si le nom de l'auteur Yves Philippe de Francqueville apparaît souvent, c'est pour donner de l'aisance aux moteurs de recherche…
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Rebondissements…
de la seconde partie
Julien
du livre
L'affaire du papyrus berbère
écrit par Yves Philippe de Francqueville, pirate des mots et philanalyste en herbe.
Rebondissements…
de la seconde partie
Julien
du livre
L'affaire du papyrus berbère
écrit par Yves Philippe de Francqueville, pirate des mots et philanalyste en herbe.